À l'origine : mes intuitions. J'ai le sentiment que les choses se répètent, que tout tourne. Je perçois le vide, un vortex. Derrière ces intuitions se cache une vérité, quelque chose d'important que je dois découvrir. Mon obsession est de collecter les preuves, obtenir confirmation, me rapprocher peu à peu de la vérité. Je matérialise mes visions dans le verre et l'argent, sous la forme de mirages brillants et transparents, pour les rendre lisibles, tangibles. J'utilise la chimie pour appréhender le monde tel que je le vois, le vide, les répétitions, le tourbillon. Tout passe par moi et par mes mains. Je suis le maelstrom que je mets en images. Je n'ai ni contours ni limites.

Je fais des ambrotypes. Un ambrotype est une photographie sur verre dont les ombres sont transparentes et les lumières faites d'argent pur. Il est obtenu à partir du procédé collodion humide qui permet, après avoir créé puis exposé une émulsion photosensible, de faire germer de l'argent sur l'image latente. Placé devant un fond sombre, l'argent réfléchit la lumière et donne une image positive. Je travaille seul, selon un protocole que j'ai mis au point, que j'ai adapté à ma pratique. La réalisation technique d'un de mes ambrotype se fait en deux phases.
D'abord il y a la prise de vue d'une situation fortuite ou provoquée, pour laquelle j'utilise un film noir et blanc traité chimiquement de façon à obtenir une diapositive. Puis dans la chambre noire, je projette la diapositive sur la plaque au collodion humide pour obtenir l'ambrotype. Ces deux phases sont fractionnées en une multitude d'étapes. Chaque étape a son fluide dédié. Ce cérémonial est le mien, je l'ai imaginé, pensé, structuré. Je le répète en boucle.